Mille credos (suite)
Le dimanche matin, tenant le petit bout par la main, ses grandes soeurs allaient à la messe. Dans leurs petits sacs, quelques pièces de monnaie "pour la quête", disaient-elles. Hélas, les saintes sébiles n'en voyaient pas la couleur. C'était plutôt le marchand de bonbons, astucieusement placé devant l'Eglise et ouvert surtout le dimanche, qui recevait la tribu d'enfants aux yeux brillants de gourmandise.
Pendant les dernières années passées dans son pays, le gamin suivit les classes de catéchisme de façon régulière. Les séances de cinéma qu'offrait ce bon vieux prêtre à la barbe longue et blanche contribuaient fortement à une assiduité exemplaire.
Mais le gamin avait pour ce religieux, une admiration proche de l'adoration. C'est dans la partie centrale de la messe, au cours de laquelle le prêtre, agissant in persona Christi, prononce sur le pain et le vin les paroles consécratoires par lesquelles s'opère le Mystère : ce sont désormais le corps et le sang du Christ qui sont réellement présents sur l'autel.
A cet instant, pendant longtemps, l'enfant n'osa jamais lever la tête, pensant que ce bon curé faisait régulièrement un véritable miracle, non pas dans la croyance du Mystère Divin, mais dans ce fameux tour de magie permettant de changer cette énorme hostie parfaitement ronde en un nombre exact de petites toutes aussi rondes que la première. Pour lui, ce geste génial justifiait toute la déférence respectueuse qu'on devait lui témoigner. Ce Saint magicien marqua au fer rouge, l'imagination de ce garçon et le mit plus tard à l'abri de toutes manipulations... (à suivre)
ãTchema 2011