Souvenirs d'un petit soldat.
Il me vient en mémoire de sinistres instants.
La troupe silencieuse avançait aux pas que la neige étouffait. Seuls les tambours en sourdine donnaient le ton à ce cortège funèbre et glacial.
Le ciel gris soupoudrait les tenues sombres de flocons légers et les hauts branchages semblaient saluer notre
passage.
Chacun d'entre-nous, surpris de ce décés brutal, réservait à ce vieux religieux, le respect que l'on doit à sa mémoire. La mort nous était alors inconnue pour paraître exceptionnelle. Il fallait rendre hommage à celui qu'elle frappait.
Mais il y avait ce froid. Ce froid humide et pénétrant que nous n'aurions contesté tant il rendait authentique le triste
évennement.
Soudain, le silence au fond de l'allée, près du petit cimetière, derrière les cyprés. Quelques coups sourds sur le bois du cercueil et voilà que se comble déjà l'absence du défunt.
Le retour dans les classes se fait rapide, presque à la hâte. Le chuchotement suit et se transforme en bavardage que les surveillants n'osent interrompre. Repose en paix, nous avons froid.