Le Chemin des Ruines.
L'approche des grandes vacances sentait bon l'ambre solaire. L'année scolaire avait été très moyenne. A la rentrée, la décision de poursuivre ses études dans cette école militaire enchantait autant qu'inquétait ce gamin de huit ans. Il n'osait s'avouer la somme de courage dont il faudrait faire preuve au moment de quitter les siens. Tous les renseignements transmis sur l'établissement prestigieux convenaient aux parents, il se contentait, lui, d'éxécuter. Les événements sur le territoire prenaient une mauvaise tournure, le changement d'air pour l'enfant chétif, deux raisons qui semblaient remporter l'unanimité... et, dernièrement, Maman avait cédé.
D'ici là, les vacances occultaient, pour un temps, toutes les difficultés du monde.
Ce matin, Jeanne, sa soeur, avait promis une journée au RUA, un complexe de loisirs aquatiques réputé situé en plein milieu
du port. De bons résultats au volley ball et au handball faisaient régulièrement la une des Echos d'Alger.
Une journée magnifique s'annonçait pour les deux jeunes qui, tôt le matin, avait pris le tramway bruyant en bas de l'immeuble pour les amener juste au bord des quais. A proximité, de petites embarcations drainaient les visiteurs, traversant la rade, jusqu'à l'établissement isolé. Ce petit voyage maritime représentait parfaitement et merveilleusement le dépaysement total, vers l'aventure, l'éxotisme, le comble du plaisir.
Des heures dans l'eau, des plongeons les plus téméraires, rien ne semblait fatiguer l'enfant aux genous fragiles, aux épaules
saillantes.
L'interdiction de courir n'empêchait pas son trottinement nerveux d'un coté, de l'autre sur le carrelage brûlant.
Pendant la trêve de midi, il dévorait un énorme sandwich, posté tout en haut des rochers. De cette hauteur, le nez au vent du large, il dominait la mer dont une armée de vagues attaquait inlassablement d'invincibles remparts.
Soudain, la forme blanche du Kerhouan débouchant de la jetée, s'élançait vers l'horizon après un hurlement de sirène.. D'une main frêle aux doigts bleus de froid, le gamin envoyait un salut à transmettre au continent qu'il rejoindrait bientôt. (à suivre)
ãTchema 1999